Fraude aux eaux minérales Nestlé : une information judiciaire ouverte

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Après une première amende, vers des investigations plus larges ? Une information judiciaire a été ouverte jeudi 13 février par un juge du pôle santé publique du tribunal de Paris, a appris Le Monde et Radio France de source judiciaire. La procédure fait suite à la plainte contre X avec constitution de partie civile déposée pour «tromperie», en septembre 2024, par l’association de défense des consommateurs Foodwatch. Sollicité par le Monde, Nestlé explique ne «pas commenter les procédures judiciaires en cours».

Foodwatch avait déposé cet automne deux plaintes avec constitution de partie civile contre les pratiques de Nestlé Waters (Perrier, Hépar, Contrex, Vittel), filiale du géant suisse, et celles du groupe Sources Alma, leader en France des eaux minérales et de source (Cristaline, St-Yorre, Vichy Célestins, etc.).

De nombreuses infractions étaient visées, dont la tromperie et les pratiques commerciales trompeuses, dans la plainte déposée par Me François Lafforgue. Ces informations judiciaires sont «une excellente nouvelle», a réagi Karine Jacquemart, directrice générale de Foodwatch, qui espère «casser le climat d’impunité et que la justice fasse toute la lumière sur les responsabilités de Nestlé Waters et Sources Alma mais aussi sur le rôle des autorités publiques et particulièrement du gouvernement».

Début février, Radio France et Le Monde ont publié des éléments accusant la présidence et les services du Premier ministre d’avoir cédé au lobbying de Nestlé. Dès novembre 2022, Médiacités avait indiqué que la répression des fraudes enquêtait sur «l’adjonction dissimulée de gaz carbonique industriel et d’une substance chimique interdite» dans des eaux de sources Alma.

Début 2024, visé à son tour par des révélations de Radio France et du Monde, Nestlé Waters avait reconnu avoir eu recours par le passé à des traitements interdits (filtres au charbon, UV) qu’il dit avoir depuis retirés, et avait indiqué en avoir avisé le gouvernement français en 2021. Après cette alerte et sans toutefois ébruiter l’affaire ni informer les consommateurs, les autorités avaient ensuite permis aux industriels d’utiliser des microfiltres avec un seuil de filtration inférieur à 0,8 micron, qui fait depuis 2001 office de jurisprudence, faute de précision dans la réglementation européenne.

Nestlé a aujourd’hui toujours recours à des systèmes de microfiltration à 0,2 micromètre, soulignant qu’ils ont été approuvés par le gouvernement en 2023 dans le cadre d’un plan de transformation soumis aux autorités. «Toutes nos eaux aujourd’hui sont pures à la source», a aussi affirmé le 7 février Muriel Lieneau, directrice générale de Nestlé Waters.

Dans une procédure visant spécifiquement ses eaux vosgiennes pour utilisation de traitements non autorisés sur les eaux minérales et exploitation de forages sans autorisation, Nestlé Waters a déjà payé en septembre à Epinal une amende de deux millions d’euros pour échapper à un procès.

Foodwatch avait jugé le montant dérisoire. Alors qu’un principe judiciaire fondamental est qu’on ne peut être jugé deux fois pour les mêmes faits, le parquet de Paris a indiqué que le juge «étudierait dans le cadre de l’information judiciaire» les effets de cette amende payée par Nestlé, «susceptible de porter sur une partie des faits» relevant de la saisine du juge. La question pourrait aussi se poser pour le groupe Alma, visé par une procédure au parquet de Cusset (Allier).

Les révélations de presse avaient conduit le Sénat à lancer en novembre une commission d’enquête, tandis qu’un premier rapport sénatorial divulgué un mois plus tôt pointait déjà l’«opacité» des pouvoirs publics et des industriels dans ce dossier.

Libération

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