« Notre histoire de France » : Faire de la figuration sur l’épisode dédié à Charlemagne a failli me coûter ma barbe

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«Je vais vous raser la barbe, d’accord ? » La question me prend de court. Bien sûr que je ne m’y attendais pas et évidemment que je ne suis pas préparé à finir la journée moustachu. Y penser me colle des sueurs froides et je tente de contenir (mal) la panique qui me traverse.

Quand la société de production ITV Studios m’a proposé de faire un reportage sur le tournage de l’épisode de « Notre histoire de France » consacré à Charlemagne, pour France 2, et d’en profiter pour faire de la figuration, l’idée m’a amusé. Mais ce jeudi d’avril, dans les loges d’habillage, coiffure et maquillage installées dans un hôtel de Provins (Seine-et-Marne), je me demande dans quelle galère je me suis embarqué.

Alors je temporise, j’expose mes atermoiements à mes interlocuteurs qui, mi-rigolards, mi-concernés, tentent de trouver une solution. Je suis journaliste, pas comédien, et je ne suis pas prêt à sacrifier mes poils au nom de l’art dramatique, déso pas déso Sarah Bernhardt.

« Eviter que ça fasse trop Jésus Christ »

Mon salut vient d’un conseiller qui flâne dans les parages, gravures en main, prouvant que ma barbe n’aura rien d’anachronique dans le décor même si effectivement, les moustaches étaient aussi très répandues. « C’est vrai qu’il n’y a pas une grande connaissance sur la capilosité de cette époque-là. On n’a pas énormément de références. Les gens n’étaient pas apprêtés, ça, on le sait », m’explique Céline, qui s’occupe de ma coiffure. « Je vais vous laisser les cheveux naturels, je fais juste une demi-queue, avec un petit ruban, pour éviter qu’avec la barbe ça fasse trop Jésus Christ », me prévient-elle.

Ce jour-là, une soixantaine de personnes, comédiens et figurants, passent sous les mains de la coiffeuse. « Il y a beaucoup de cheveux longs, de barbes, on essaye de varier les plaisirs », sourit-elle. Certains confrères embarqués dans l’aventure comme moi se retrouvent équipés de perruques.

Côté tenue, pas de problème, j’avais indiqué mes mensurations au préalable et les vêtements m’attendaient sur un cintre. Un pantalon vert assez large, une tunique cernée d’une ceinture à laquelle une bourse est accrochée et une espèce de cape me font entrer directement dans le personnage et s’avèrent confortables malgré la fraîcheur du jour.

« On veut être le plus rigoureux possible, c’est un peu stressant »

La production expliquera plus tard avoir travaillé avec « des chefs costumiers qui ont un réseau fort, des gens qui sont dans la reconstitution historique, qui sont des passionnés, qui ont des pépites ». Rien n’est laissé au hasard : « Pour l’épisode sur Vercingétorix, deux des comédiens étaient filmés en train de parler. Un conseiller est intervenu car le nœud de la ceinture n’était pas placé du bon côté. » « On voulait être le plus rigoureux possible à tous les niveaux pour éviter les anachronismes, c’est un peu stressant, il ne faut rien laisser passer. », confie la productrice Cécile Lévy.

En se rendant sur les lieux du tournage, la collégiale Saint-Quiriace de Provins, l’ambiance entre journalistes/figurants d’un jour est légère, les blagues à base de « Jacquouille la Fripouille » fusent. Mais dès que les caméras s’apprêtent à tourner, la solennité s’installe immédiatement. Il faut dire que la séquence qui va être mise en boîte n’est pas banale : ce n’est ni plus ni moins que le sacre de Charlemagne.

Nous voici donc en l’an 800, à la basilique Saint-Pierre de Rome. Consigne nous est donnée de nous mouvoir en jouant des coudes pour essayer d’être aux premières loges, piqués par la curiosité. Tomer Sisley, qui incarne le programme, passe au milieu de nous. « L’événement auquel vient assister cette foule va marquer à tout jamais le continent européen ainsi que l’histoire de la chrétienté », annonce-t-il face à la caméra qui le suit.

Lui n’a pas été embauché comme comédien. « Son rôle n’est pas de faire comme s’il était un personnage, c’est d’être un narrateur, souligne Nicolas Daniel, le directeur des magazines de France Télévisions. Tomer Sisley est plongé dans une action mais il ne joue pas dans cette action. Il est là pour raconter, donner une couleur au récit, insister sur un détail et expliquer pourquoi il est important. »

« Ce geste aura des conséquences pour des siècles et des siècles »

Devant nous, les acteurs professionnels Didier Romanetto et Olivier Le Montagner incarnent respectivement le pape Léon III et Charlemagne. Au fil des prises, ils jouent et rejouent le sacre, tandis que l’assistance se tient aux aguets, silencieuse. Les téléspectateurs et téléspectatrices verront, dans cet épisode diffusé ce mardi à 21h05 sur France 2, que les deux hommes s’adonnent à une lutte de pouvoir. Le futur empereur, voulant décider de tout, avait donné ses consignes, comme celle d’être couronné debout.

La voix de Tomer Sisley s’élève dans l’église. « Léon III entend lui aussi profiter de ce sacre pour prendre le pouvoir. Il n’attend pas que Charlemagne se relève pour le couronner. Le pape n’a pas respecté le protocole et a trahi la confiance de Charlemagne. Le nouvel empereur essuie ce revers, impuissant. Ce geste aura des conséquences pour des siècles et des siècles : à compter de ce jour, c’est le pape qui fera les empereurs et pas l’inverse. »

Nous, figurants, ne sommes pas censés être au courant de ces symboles à la portée historique. Pour le dernier plan de la journée, nous faisons une haie d’honneur au nouvel empereur et nous inclinons sur son passage. Début octobre, je découvrirai que c’est à ce moment que l’on peut m’apercevoir furtivement, dans mon meilleur profil. Soulagement : barbe ou moustache, ma pilosité faciale n’aurait rien changé à la scène. Ni au sens de l’histoire.

20 Minutes

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