Guerre en Ukraine : Marioupol, l’expérience de l’indicible

Plus jamais nous n’entendrons ou ne lirons sans tressaillir l’expression «silence de mort». Natalya Diedova a expérimenté ces trois mots dans sa chair, elle en connaît l’indicible poids. Un jour de 2022, alors qu’une pluie d’obus russes venait de s’abattre sur son immeuble de Marioupol, en Ukraine, elle a hurlé le prénom de son mari, qui se tenait quelques secondes plus tôt à ses côtés, dans leur appartement, et seul le silence lui a répondu. Un silence qu’elle n’oubliera jamais. Vitya était mort et elle a dû abandonner le corps de celui avec qui elle avait passé la moitié de sa vie pour courir vers son fils de 13 ans et le mettre à l’abri. Il faut lire ce témoignage recueilli par nos reporters en Ukraine et le faire lire à tous ceux et toutes celles – Donald Trump au premier chef – mais aussi certains responsables français qui osent encore affirmer que la Russie est dans son bon droit et que l’Ukraine serait en réalité l’agresseur.

Ce que nous raconte Natalya Diedova de la mort semée par les Russes de façon indiscriminée dans les territoires qu’ils ont décidé de conquérir, de la terreur subie à chaque seconde du jour et de la nuit par les civils ukrainiens, est une preuve accablante supplémentaire – s’il en était besoin – de l’entreprise de destruction et de reconquête russe à l’œuvre depuis le 24 février 2022. Marioupol a fini par tomber aux mains des hommes de Vladimir Poutine après que des milliers d’habitants ont péri sous les bombes, une prise de guerre dont le président russe ne cesse de s’enorgueillir, vantant les barres d’immeubles neufs poussés depuis lors sur les gravats. Si les soutiens de l’Ukraine ne parviennent pas à convaincre les Américains, lors d’un sommet dédié mardi 11 mars à Djedda, de maintenir et même d’augmenter l’aide militaire à l’Ukraine, alors, à l’image de Marioupol, de nombreuses villes ukrainiennes finiront par tomber aux mains des Russes. Et c’est sur l’ensemble du pays qu’un silence de mort s’abattra.