Comment les Français s'informent pour bien manger : les résultats surprenants d'une enquête exclusive

Comment les Français s’informent pour bien manger : les résultats surprenants d’une enquête exclusive

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Comment bien manger ? Quels aliments et régimes faut-il privilégier ? Dans un pays où la cuisine est élevée au rang de patrimoine national, ces questions occupent naturellement une place centrale. Pourtant, nombre de nos concitoyens peinent à trouver des réponses fiables, et tombent parfois dans de fausses croyances. C’est ce que révèle la quatrième édition du Baromètre de l’esprit critique de l’établissement public Universcience (regroupement de la Cité des sciences et du Palais de la découverte), en partenariat avec L’Express.

L’enquête, réalisée par OpinionWay sur un double échantillon, l’un de 2000 personnes de 18 à 65 ans et l’autre de 610 personnes de 15 à 24 ans, témoigne d’une préoccupation grandissante pour l’alimentation. Elle résonne aussi avec la récente adoption du nouveau Nutri-Score, ce logo nutritionnel qui vise à lutter contre le surpoids, l’obésité et leurs maladies associées, validé malgré les critiques de la ministre de l’Agriculture.

Les régimes : fractures entre générations, zones rurales et grandes villes

“Les résultats du baromètre montrent qu’il existe une aspiration collective à faire attention aux pratiques alimentaires, ce qui participe à l’expression de notre culture française, mais cette volonté va de pair avec un manque de repères dû notamment à la multiplication des sources d’information”, constate Michel Dubois, directeur du Groupe d’étude des méthodes de l’analyse sociologique de la Sorbonne et membre du comité scientifique du baromètre. Le sondage indique que 72 % des Français aiment cuisiner, 75 % veillent à l’équilibre de leurs repas et 80 % intègrent systématiquement ou presque des fruits et des légumes dans leur alimentation.

L’étude révèle aussi une nette distinction sociologique : 56 % des sondés se décrivent omnivores, mangeant de tout, une proportion plus forte en zones rurales (62 %), tandis que flexitariens (22 %), végétariens (4 %) et végétaliens (4 %) sont davantage représentés dans les grandes villes (47 % cumulés). Une fracture générationnelle apparaît également sur ce sujet : 25 % des 18-24 ans se déclarent végétariens ou végétaliens (contre seulement 4 % des plus de 35 ans). 55 % d’entre eux motivent ce choix par un intérêt environnemental ou éthique, comme la défense du bien-être animal.

“On observe malgré tout une stabilité des comportements, puisque près de 80 % des répondants sont omnivores ou flexitariens, analyse Michel Dubois. Et les réflexions éthiques ou environnementales restent limitées puisque seule la moitié des répondants qui ont un régime alimentaire particulier déclarent se préoccuper de ces questions.”

Les Français s’informent principalement par leur entourage

“Dis-moi ce que tu manges, je te dirai qui tu es”, écrivait Brillat-Savarin. Il faudrait ajouter aujourd’hui : “Et dis-moi comment tu t’informes sur ce que tu manges.” Car dans leur recherche d’information pour bien manger, les Français recourent à de nombreuses sources : d’abord l’entourage (54 %), puis Internet hors réseaux sociaux (50 %) et les professionnels de santé (30 %).

Mais c’est sans doute le résultat sur la confiance qui est le plus éclairant. Ainsi, s’ils ne les consultent pas en priorité, les sondés croient d’abord les médecins et diététiciens (79 %). Le crédit accordé à l’entourage reste néanmoins très fort (72 %), devant les organismes publics et de recherche en santé comme l’Inserm ou Santé publique France (71 %) et les scientifiques (66 %). Plus inquiétant, 55 % estiment que les professionnels de la médecine douce et alternative sont fiables, alors que ces thérapeutes sont nombreux à diffuser de la désinformation. Les acteurs de l’agroalimentaire, eux, n’inspirent confiance qu’à 28 % des sondés.

“C’est un chiffre marquant, souligne Michel Dubois. Les industriels ont une responsabilité dans cette défiance et doivent faire des efforts s’ils veulent regagner la confiance du grand public.” Enfin, les végétariens et végétaliens préfèrent s’appuyer sur des sources alternatives comme les applications OpenFoodFacts ou Yuka (74 %), auxquelles ils font même davantage confiance qu’aux professionnels de santé (73 %).

56% des Français ne savent “pas vraiment qui croire”

Mais si les Français multiplient leurs sources d’information, 56 % d’entre eux ne savent “pas vraiment qui croire”. Les 18-24 ans semblent encore plus perdus, puisqu’ils sont 65 % à partager ce sentiment. Cette incertitude se reflète dans la persistance de croyances erronées : 58 % des participants considèrent qu’une “cure détox” est efficace pour nettoyer l’organisme après un excès alimentaire ; 37 % pensent que les compléments alimentaires permettent de corriger une mauvaise alimentation et 34 % estiment que les hommes ont besoin de plus de viande rouge que les femmes.

Ces croyances sont encore plus répandues chez les 15-24 ans (respectivement 65 %, 53 % et 46 %). Au total, près de 80 % des sondés adhèrent à au moins une contre-vérité sur les pratiques alimentaires. Pire encore, certaines connaissances basiques ne semblent pas intégrées. Seuls 36 % des sondés connaissent la recommandation de consommer au moins cinq fruits et légumes par jour. “La maîtrise des savoirs sur la nutrition mérite d’être renforcée, analyse Michel Dubois. La communication des messages de politique de santé publique doit également s’améliorer, notamment en visant mieux les jeunes, qui ne s’informent pas avec la télévision ou la radio.”

Les sciences inspirent confiance, mais intéressent moins

Ces enjeux face aux choix alimentaires s’inscrivent dans le contexte plus large du rapport complexe que les Français entretiennent avec la science et l’esprit critique, indiquent les autres volets du Baromètre 2025. L’intérêt pour les sciences connaît ainsi un recul par rapport à janvier 2024, même s’il reste largement partagé. 62 % des plus de 18 ans rapportent que les sujets scientifiques les intéressent, en baisse de 7 points. Seule l’actualité politique progresse (63 %, + 2 points).

L’image des sciences demeure heureusement positive : 78 % des répondants attribuent plus de valeur à une affirmation si elle a été validée scientifiquement et 82 % considèrent que la science permet de développer de nouvelles technologies utiles à tous. Les 15-24 ans lui accordent une confiance plus marquée et la placent au septième rang de leurs centres d’intérêt (contre la 11e place pour les plus âgés).

L’esprit critique, une notion complexe pour les plus jeunes

Les trois quarts de nos concitoyens estiment aussi posséder un esprit critique, qu’ils associent principalement au raisonnement logique et rationnel (43 %), à la capacité d’échanger avec des personnes aux opinions divergentes (40 %) et au fait de s’informer davantage avant de se positionner (39 %). Les 15-24 ans, eux, valorisent moins l’échange avec des interlocuteurs aux opinions divergentes (35 % contre 40 %) et davantage la capacité à justifier leurs choix (37 % contre 32 %) et à remettre en question la parole de l’autorité (24 % contre 17 %). Paradoxalement, ils rapportent plus de difficultés face aux opinions divergentes : 60 % reconnaissent qu’il leur arrive de persister dans leurs arguments même sans être sûrs de leur solidité (contre 46 % pour les 18-65 ans) et 58 % préfèrent échanger avec des personnes qui partagent leurs opinions (contre 49 %).

“Cette enquête montre qu’il y a encore de nombreux défauts dans la maîtrise de l’information alimentaire, en particulier chez les jeunes, et qu’il convient d’améliorer la communication sur ce sujet”, analyse Michel Dubois, qui se félicite néanmoins des résultats portant sur la science. “A l’heure où la communauté scientifique est violemment attaquée, notamment aux Etats-Unis où le gouvernement recourt à des arguments populistes, le baromètre montre au contraire qu’une majorité de la population hexagonale voit la science positivement.” Une autre différence – avec l’art de la table – qu’il convient de cultiver soigneusement.

L’Express

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