En Russie, la justice requiert plus de trois ans de prison contre le chercheur français Laurent Vinatier

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Ce spécialiste de l’espace post-soviétique marié à une Russe, qui travaillait dans une ONG de médiation diplomatique, est accusé de ne pas s’être enregistré en tant qu’«agent de l’étranger», dans un contexte de relations tendues entre Paris et Moscou.

C’est un réquisitoire particulièrement sévère, estime la défense. La justice russe a réclamé ce lundi 14 octobre une peine de trois ans et trois mois de prison ferme à l’encontre du Français Laurent Vinatier. Détenu en Russie depuis juin, il est accusé d’avoir manqué à son obligation de s’enregistrer en tant qu’«agent de l’étranger», un délit passible de cinq ans de prison. «L’accusation demande de reconnaître l’accusé coupable. a déclaré la procureure dans la salle d’audience d’un tribunal à Moscou, selon une journaliste de l’AFP présente. Je propose d’imposer une peine de privation de liberté d’une durée de trois ans et trois mois, à purger dans une colonie pénitentiaire.»

Un label utilisé contre les voix critiques

Laurent Vinatier, âgé d’une quarantaine d’années, avait reconnu ne pas s’être enregistré sous ce label d’«agent de l’étranger», utilisé en Russie contre les voix critiques et qui impose de lourdes obligations administratives, sous peine de sanctions pénales. Il avait assuré ignorer que cette obligation avait été introduite au Code pénal. «Nous considérons que la peine demandée par la procureure est extrêmement sévère», a déploré l’un des avocats russes de Vinatier, Oleg Bessonov, qui a rappelé que son client avait «avoué pleinement sa culpabilité» en plaidant l’ignorance. «Cette demande est déraisonnable et illégale», a martelé son autre avocat, Alexeï Sinitsine. Les deux conseils ont demandé que leur client soit sanctionné par «une amende».

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Ce chercheur spécialiste de l’espace post-soviétique, qui dit «aime[r] la Russie», d’où sa femme est originaire, travaillait sur le sol russe pour le Centre pour le dialogue humanitaire, une ONG suisse qui fait de la médiation dans des conflits hors des circuits diplomatiques officiels. Selon des sources interrogées par l’AFP, le Français travaillait depuis des années sur le conflit entre la Russie et l’Ukraine, avant même l’offensive russe de février 2022, dans le cadre de discrets efforts diplomatiques en parallèle à ceux des Etats. Jusqu’à son arrestation, il effectuait des voyages dans les deux pays.

Relations tendues entre Moscou et Paris

Les services de sécurité russes (FSB) affirmaient début juillet, dans un communiqué, que l’accusé avait établi de «nombreux contacts» avec des politologues, des économistes et des experts militaires russes, ainsi qu’avec des fonctionnaires. «Au cours d’échanges avec ces personnes, [il] a notamment recueilli des informations militaires et militaro-techniques qui peuvent être utilisées par des services de renseignement étrangers à l’encontre de la sécurité de la Russie», déclarait alors le FSB. Ces accusations pesant contre lui avaient fait pendant une certaine période redouter une inculpation plus grave, par exemple pour «espionnage», un crime passible de vingt ans de privation de liberté en Russie. Début septembre, la détention provisoire du Français avait été prolongée de six mois au premier jour de son procès, jusqu’au 21 février.

Cette affaire survient aussi à un moment où les relations entre Moscou et Paris sont très tendues : la Russie est accusée d’une série d’actes de déstabilisation et de désinformation sur le territoire français, tandis que la France se voit reprocher son soutien à l’Ukraine. Ces dernières années, plusieurs Occidentaux, en particulier des Américains, ont été arrêtés en Russie et visés par de graves accusations, Washington dénonçant des prises d’otages pour obtenir la libération de Russes détenus à l’étranger. Le 1er août, les Occidentaux et la Russie ont procédé au plus grand échange de prisonniers depuis la fin de la Guerre froide, parmi lesquels figuraient le journaliste américain Evan Gershkovich et l’ancien Marine Paul Whelan, libérés par Moscou.

Libération

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