Lutte contre le VIH : à Saint-Denis, des militants d’Aides à l’écoute des migrants

Lutte contre le VIH : à Saint-Denis, des militants d’Aides à l’écoute des migrants

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AIDES : 40 ans de mémoires de lutte contre le VIH/sidadossier

Chaque semaine, une équipe mobile de Aides s’installe devant la gare dyonisienne pour faire de la prévention et proposer des dépistages gratuits du VIH et des infections sexuellement transmissibles à l’attention des personnes migrantes, souvent éloignées des parcours de soins. «Libération» a suivi une de leurs actions.

Les visages pressés défilent en continu sur le parvis de la gare de Saint-Denis. Emmitouflés dans leur parka pour se protéger du froid et de la pluie de ce lundi de fin novembre, Nolwenn et ses collègues tendent des tracts qui laissent apparaître un logo en forme de ruban rouge. Quelques curieux sont invités à s’abriter pour discuter sous les barnums, dont l’un arbore une bâche indiquant : «AIDES, les tests rapides, c’est ici.» Comme chaque semaine, une équipe de la section de Seine-Saint-Denis de l’association Aides est venue avec son camion pour faire de la prévention et proposer des dépistages rapides et gratuits du VIH, de la syphilis et des hépatites B et C.

«Alors, comment est le café ?», lance avec un large sourire Yanncey Maisonneuve, qui rejoint ses camarades depuis le van aménagé en unité de dépistage mobile. Yanncey est rodé, il travaille pour Aides depuis 2012 et sait que l’action devant la gare de Saint-Denis attire «toujours du monde». «La Seine-Saint-Denis est un département dont la population présente une forte prévalence au VIH», résume-t-il. Selon un communiqué de 2022 de la caisse primaire d’assurance maladie du département, celui-ci «se place en deuxième position des départements les plus touchés en France métropolitaine, derrière Paris» avec 300 à 400 nouveaux cas de VIH détectés par an.

Grande précarité

Dans son bilan de surveillance du VIH et des infections sexuellement transmissibles (IST) paru en octobre, Santé publique France rappelle que 57 % des 5 500 découvertes de contamination de l’année 2023 concernaient des personnes nées à l’étranger, notamment en Afrique subsaharienne (38 %). «Mais il faut aussi rappeler que 42 % des séroconversions interviennent sur le territoire français selon le même bilan», précise Nolwenn, battant en brèche une éventuelle rhétorique raciste. Les personnes migrantes sont souvent en grande précarité, éloignées des parcours de soins, peu informées sur la Prep (traitement préventif afin d’éviter d’être contaminé) et sont malheureusement plus exposées aux infections.

Après quelques refus, Nolwenn attire un curieux et lui décrit le contenu du stand. Au milieu des nombreux flyers d’information se trouvent des préservatifs internes, externes, du lubrifiant, des tampons et kits d’hygiène intime féminins, des autotests de dépistage du VIH ou encore des seringues stérilisées à usage unique («pour éviter les infections quand on consomme de la drogue»). Son interlocuteur, comme beaucoup, repart avec une poignée de préservatifs.

Si, à l’avant du stand, la prévention bat son plein, à l’arrière, Yanncey et Nina multiplient les dépistages. Le temps d’une brève pause, la militante s’allume une cigarette. Elle a rejoint l’association en 2018 après avoir été diagnostiquée séropositive. Depuis, elle s’est formée pour réaliser les tests et «pour accompagner les personnes en rupture avec le parcours de soins et qu’elles s’autonomisent.» Sa cigarette à peine finie, elle file s’occuper d’un nouveau dépistage. Pascal, travailleur congolais de 34 ans, souhaite se faire tester pour le VIH, les hépatites et la syphilis. Comme à chaque fois, Nina commence par poser une batterie de questions à la personne en face d’elle sur sa santé, ses connaissances du VIH, ses vaccins, ses pratiques sexuelles… Puis, avec une petite piqûre au bout du doigt, elle récupère quelques gouttes de sang et les fait réagir avec un principe actif.

«C’est politique»

En attendant les résultats, l’accompagnatrice en santé poursuit son entretien et demande à Pascal s’il bénéficie de l’aide médicale d’Etat (AME). «Non.» «Il faut vraiment batailler pour avoir l’AME, mais c’est ton droit», lui rappelle la jeune femme en lui donnant ses résultats, négatifs, et en l’invitant à passer la voir au local dyonisien d’Aides lors des heures de permanence du mercredi après-midi pour commencer à monter un dossier.

«Le combat contre l’épidémie du VIH, c’est politique», souffle Nina après une autre cigarette. «Aujourd’hui, 49 % des personnes éligibles à l’AME n’y ont pas recours, rappelle Camille Spire, présidente de Aides, jointe par téléphone. Mais pour les populations migrantes, sans AME, elles n’ont accès ni aux soins ni aux traitements. Donc le virus poursuit sa propagation. Supprimer ou modifier l’AME, cela serait indécent pour les malades et terriblement inefficace en termes de santé publique.»

Fin de journée pour l’équipe de Saint-Denis. Avant de lever le camp, les militants débriefent : «C’était une grosse après-midi. Avec Nina, on a fait dix-sept dépistages, conclut Yanncey fatigué, mais toujours souriant. C’est sur ce terrain qu’on a un véritable impact et qu’on touche notre public cible

D’ici 2030, la France veut avoir éradiqué le sida. Pour cela, l’action seule des associations comme Aides ne suffira pas. Au téléphone, Camille Spire le rappelle encore : «Il faut revoir la politique d’accueil des migrants, favoriser leur accès au soin.» A rebours des dernières volontés du gouvernement Barnier.

Libération

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